La majorité de la CEATE-E rompt sa promesse électorale et supprime le droit de recours des organisations

Communiqué de presse du 11.10.2024 de Pro Natura, WWF Suisse et BirdLife Suisse

La majorité de la Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et de l’énergie du Conseil des États (CEATE-E) utilise le projet d’accélération des procédures pour les énergies renouvelables pour vider le droit de recours des organisations de sa substance et étouffer ainsi la voix de la nature. En plus d’affaiblir l’application du droit environnemental, cette décision déséquilibre l’ensemble du projet.

Quatre mois seulement après la votation sur la loi sur l’électricité, la majorité de la CEATE-E rompt la promesse du Conseil fédéral et du Parlement selon laquelle «les particuliers et les organisations pourront cependant toujours faire recours.» (explications aux électeurs concernant la loi sur l’électricité) et ignore la volonté populaire: au lieu de rationaliser les procédures d’autorisation des projets énergétiques – comme l’avaient prévu le Conseil fédéral et le Conseil national – une majorité de la CEATE-E veut restreindre massivement le droit de recours des organisations et donc la voix de la nature. A l’origine, le projet d’accélération des procédures pour les énergies renouvelables visait à simplifier et à rendre plus efficaces les procédures d’autorisation des projets énergétiques d’intérêt national – une préoccupation soutenue explicitement par les organisations environnementales. Mais aujourd’hui, une majorité de la CEATE-E va trop loin en voulant restreindre massivement le droit de recours de la société civile. Ce serait un coup dur porté à l’état de droit et une perte de confiance massive à l’égard de la politique si la promesse faite pendant la campagne électorale était rompue. Les nombreuses décisions ultérieures devront encore faire l’objet d’une analyse détaillée une fois que les documents pertinents seront disponibles.

La commission de l’environnement du Conseil des États a déséquilibré le projet de loi en supprimant le droit de recours des organisations pour les 16 centrales hydroélectriques retenues dans la loi sur l’électricité. Ce seuil est fixé arbitrairement et ne dit rien de la qualité de la procédure de recours des différentes organisations. Les chiffres de la statistique des recours confirment l’utilisation modérée et ciblée du droit de recours des organisations par celles qui défendent l’environnement: entre 2010 et 2020, environ 750 projets de centrales hydroélectriques, éoliennes ou de biomasse ont été réalisés et une amélioration de la protection de la nature n’a été requise que dans seulement 62 projets.

La principale cause de lenteur dans la mise en œuvre des projets énergétiques n’est en outre pas le droit de recours des organisations, mais des procédures de planification et d’autorisation souvent longues, ainsi que le manque de ressources dans les services administratifs et les tribunaux compétents. Ce sont précisément ces écueils qui doivent être abordés avec le projet d’accélération.

Le projet risque d’échouer

La décision de la majorité de la CEATE-E déséquilibre le projet, qui aura de la peine à réunir une majorité. Le droit de recours des organisations est une pierre angulaire du droit environnemental et un élément essentiel du respect de la séparation des pouvoirs. La limitation de ce droit, telle qu’elle a été décidée, est inutile, déraisonnable et disproportionnée. Le Parlement doit ici corriger la décision de la CEATE-E.

 

Le droit de recours des organisation

Comme la nature ne peut pas faire entendre elle-même sa voix, le droit de recours des organisations permet, dans des cas particulièrement critiques d’atteintes importantes à la nature et à l’environnement et après une analyse minutieuse, de faire examiner les autorisations délivrées à des projets par un tribunal. Les décisions sont toujours prises par les juges.

Le droit de recours des organisations est un instrument important et éprouvé du droit environnemental, et il est utilisé de manière responsable. Il n’est accordé qu’aux organisations environnementales qui se sont engagées depuis plus de 10 ans dans la protection de la nature à l’échelle nationale. Durant cette période, il y a eu en moyenne moins de 6 recours d’organisations par an, afin que les améliorations prescrites par la loi pour protéger la nature soient réalisées lors de la construction de projets de production d’énergie renouvelable.

Dans deux cas sur trois où le droit de recours est utilisé, la situation de la nature est améliorée comme l’exige la loi. Comparé au droit de recours individuel dont disposent les particuliers, le droit de recours des organisations est utilisé de manière très économe et efficace. Les tribunaux approuvent les recours des organisations trois à quatre fois plus souvent que ceux des particuliers. Une étude de l’Université de Genève montre que seulement un recours sur 100 est déposé auprès des tribunaux cantonaux en raison du droit de recours des organisations. Les autres sont des recours de particuliers.


Informations complémentaires

  • BirdLife Suisse : François Turrian, directeur romand, 079 318 77 75
  • Pro Natura : Nicolas Wüthrich, responsable de l’information, tél. 079 212 52 54, nicolas.wuthrich@pronatura.ch
  • WWF Suisse : Pierrette Rey, porte-parole du WWF Suisse, tél. 021 966 73 75, pierrette.rey@wwf.ch